Interview

Alix Senator : Valérie Mangin nous raconte son travail (10/2015)

L’empereur Auguste veut rassembler tous les livres sibyllins dans le temple d’Apollon Palatin, à Rome. Mais son envoyé à Delphes, en Grèce, est attaqué et tué lors d’une confrontation avec ceux qui semblent être des hoplites spartiates. Son précieux chargement s’est, quant à lui, volatilisé. Chargé de retrouver le trésor et de punir les coupables, le sénateur Alix Graccus mène l’enquête, accompagné par Titus et Khephren. Dans le même temps, son ancien protégé, Héraklion, qui vit désormais sur la terre de ses ancêtres, tente de le convaincre que la cité de Sparte n’a pas commandité ce crime.
Comme pour faire écho à Par-delà le Styx, ce quatrième album de la série dérivée Alix Senator – qui inaugure également un nouveau cycle – évoque lui aussi avec insistance l’un des récits légendaires du célèbre héros galloromain : Le Dernier Spartiate. Les rebelles grecs, si tant est qu’ils existent, y ont toutefois perdu de leur superbe, comparés aux bâtisseurs de l’imposante citadelle de la reine Adréa.
Ils ressemblent plus à une bande de brigands qu’aux 300 braves du roi Léonidas qui ont combattu les Perses aux Thermopyles, et auxquels ils entendent pourtant se comparer. Il faut dire que la Grèce n’est plus que l’ombre d’elle-même. Alix traverse des zones dévastées par les guerres civiles successives qui ont fait de cette province romaine un champ de bataille commode pour des généraux en quête de gloire. Une situation dramatique, qui fait même dire à Héraklion que « la vraie Grèce n’existe plus : elle a disparu pour toujours ». Visiblement devenu plus raisonnable avec l’âge, le fils d’Héraklios et d’Adréa est à l’image de sa ville : rangé du côté du plus fort, Rome, même si une haine tenace l’anime encore ; et certainement à jamais. Une région, deux époques. La Grèce sert de décor au premier véritable pont narratif entre les séries Alix et Alix Senator, dont les intrigues se complètent naturellement en enrichissant de brillante manière l’univers de la plus célèbre saga de Jacques Martin.

Quatre questions à Valérie Mangin

Pourquoi avez-vous accepté de travailler sur le personnage d’Alix ?

V. M. : Parce qu’on me l’a proposé, et que dire « non » était impossible. Alix est la première série de bande dessinée réaliste que j’ai lue enfant. Elle m’a profondément marquée et a influencé une bonne partie de mes albums.

Pourquoi avez-vous souhaité vous lancer dans un spin-off ?

V. M. : Quand on m’a proposé de travailler sur Alix, la série-mère allait son chemin très bien sans moi. Montrer un Alix vieilli de 30 ans, et dessiné de manière plus réaliste, devait en revanche me permettre d’aborder des aspects inédits de la personnalité du héros et de son univers.

En quoi ce personnage est-il moderne ?

V. M. : Alix est un peu le reflet de ses auteurs. Il est moderne parce que nous sommes influencés par notre époque et que nous la projetons sur lui. Alix est ainsi le miroir de nos préoccupations. Le Gaulois devenu Romain nous interroge forcément sur le sort que nous réservons nous-mêmes aux étrangers.

Que pensez-vous apporter à ce personnage ?

V. M. : J’espère l’avoir rendu plus humain et lui avoir donné une certaine profondeur. Alix Senator a connu des décennies de guerres civiles atroces et a dû accepter la dérive autocratique d’Auguste. Il a perdu des êtres chers, comme Enak, et il est devenu père. Tout cela marque forcément un homme.

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